Les Rebondisseurs Français ont interrogé Guillaume Prévost, directeur associé et CTO de Storybee, nouveau partenaire de l’association, sur les notions d’échec et de rebond. Une vision et des partages pertinents…
Comment percevez-vous l’importance du rebond entrepreneurial, notamment dans le contexte actuel ?
Le rebond nous paraît aujourd’hui primordial pour le tissu entrepreneurial Français. C’est un constat que nous avons fait en 2020 et qui nous a poussé à créer Storybee pour accompagner la transmission d’entreprises. C’est surtout le manque d’accompagnement proposé aux entrepreneurs lors de la transmission des petites entreprises qui nous a frappé, et pour lequel nous avons souhaité apporter une solution (dans le secteur du digital en ce qui nous concerne).
Au-delà de la transmission, en étant au contact quotidiennement avec des entrepreneurs sur des moments clés de leurs projets, nous avons vu à quel point l’arrêt d’une activité, même lorsqu’elle est rentable et que « l’exit » est un succès, est un tournant important pendant lequel les dirigeant(e)s sont appelé(e)s à rebondir, soit vers un nouveau projet, soit de retour dans une activité salariée.
Aujourd’hui, avec le contexte économique difficile, qui pousse de nombreuses entreprises vers la faillite ou l’arrêt, il semble d’autant plus important que des organismes existent pour aider les entrepreneurs à rebondir à la suite de l’arrêt de leur activité.
Quels sont, selon vous, les principaux défis et obstacles auxquels les entrepreneurs font face lorsqu’ils cherchent à rebondir après un échec ou une difficulté ?
Selon moi, les principaux obstacles sont de l’ordre émotionnel : souvent, après avoir tant donné pour son activité, les entrepreneurs ressentent un grand vide. En plus de “perdre son bébé”, se retrouver désœuvré et en manque d’objectifs au quotidien peut aussi avoir un fort impact, qui peut s’apparenter à une dépression. Je peux en témoigner moi-même, lors de l’arrêt de ma première entreprise (avant Storybee), cela m’a pris plusieurs mois avant de souhaiter me relancer dans une nouvelle activité.
En-dehors de cela, un obstacle majeur est l’état d’esprit et la stigmatisation de l’échec en France, selon moi causée par le quasi-culte voué aux « entreprises à succès », ignorant le fait que même elles connaissent des échecs, dont on ne parle pas vraiment. Les réseaux sociaux, où les seuls les succès et uniquement aspects positifs sont médiatisés, en sont en partie responsables. Cela crée de nombreux blocages pour se lancer – ou se relancer – dans une aventure entrepreneuriale.
Comment votre entreprise intègre-t-elle la notion de résilience et de rebond dans sa propre activité et dans ses stratégies d’accompagnement des entrepreneurs ?
Chez Storybee, nous accompagnons des entrepreneurs qui souhaitent vendre leur entreprise numérique (e-commerce, logiciels, média digital, etc.), et travaillons aussi avec des repreneurs d’entreprises qui souhaitent se lancer en rachetant une entreprise.
Nous avons souhaité nous adresser aux entreprises d’une valeur entre allant de 100K€ à 3M€, un segment délaissé par les cabinets de fusion-acquisition, et où beaucoup d’entrepreneurs se retrouvent seuls face à leur souhait de revente ou de changement de vie.
En effet, qu’ils cherchent à acheter ou à vendre une entreprise, ces entrepreneurs sont souvent dans une phase de rebond ou à la recherche d’un changement d’activité – cette fameuse « quête de sens » dont on parle beaucoup depuis quelques années.
Le cœur de notre activité est de faciliter la transmission et de permettre aux entrepreneurs d’assurer la continuité de leur activité. Elle est donc intimement liée au rebond, et nous intégrons évidemment la dimension de résilience et les obstacles mentionnés plus haut dans notre accompagnement, qui ne se résume pas uniquement à des conseils sur la valorisation, la cession d’entreprise ou la fiscalité.
En tant qu’un des interlocuteurs privilégiés de ces entrepreneurs pendant plusieurs mois au cours de ces moments clés, nous sommes à l’écoute et pouvons essayer de les aiguiller sur leurs prochaines étapes.
Pouvez-vous nous parler des principaux défis auxquels sont confrontés les entrepreneurs lorsqu’ils cherchent à céder leur entreprise ou à en acquérir une nouvelle ?
Lors de la vente d’une entreprise, les principaux défis sont de bien s’informer, savoir se préparer et préparer son entreprise, savoir estimer la valeur de son entreprise, et évidemment la difficulté à trouver un repreneur qui correspond à l’entreprise.
Concernant le manque d’information, on parle en effet beaucoup de création d’entreprise, mais très peu de cession dans les médias. De plus, la plupart des ventes d’entreprises se font dans le secret, avec une forte confidentialité. Le fonctionnement d’une cession reste donc un mystère pour beaucoup d’entrepreneurs qui ne savent même pas que leur entreprise pourrait se revendre, ou qui pensent que cela est réservé aux grandes entreprises.
Beaucoup d’entreprises ne sont pas prêtes au moment de leur revente : il faut souvent s’y préparer au minimum quelques mois à l’avance, car une cession doit se préparer. D’une part d’un point de vue juridique (structuration, fiscalité, …), mais aussi humain, surtout si l’entreprise a des employés. D’autre part d’un point de vue opérationnel pour mettre à plat ses processus, et bien les documenter afin de faciliter la transmission à quelqu’un d’autre.
Ensuite, il est difficile pour un entrepreneur de prendre le recul nécessaire et de calculer la valeur de son entreprise de manière objective, et de pouvoir expliquer et justifier ce prix à un acheteur potentiel. Afin de faciliter les échanges, un dossier de présentation synthétique est aussi régulièrement demandé, ce qui peut être un vrai challenge !
Enfin, il faut arriver à trouver un acheteur, et surtout le bon !
Côté acquisition, la principale difficulté est là aussi de trouver des entreprises à vendre qui soient fiables. On voit beaucoup d’annonces de vente qui cachent volontairement les aspects négatifs. Le second défi est donc de savoir mener un audit d’acquisition de l’entreprise que l’on souhaite racheter, ou de le faire faire par un professionnel.
Quelles sont les ressources et les outils que vous offrez aux entrepreneurs pour les aider à surmonter les obstacles et à rebondir ?
Concernant le manque d’information, nous proposons de nombreuses ressources gratuitement en ligne, sur notre site : blog, définitions, guides, FAQs, newsletter, etc. Nous sommes aussi disponibles pour en discuter si vous avez des questions précises !
Ensuite, pour les entreprises que nous accompagnons, nous prenons en charge l’ensemble de la cession : valorisation de l’entreprise, montage d’un dossier de vente, diffusion et sélection de repreneurs ou recherche ciblée et confidentielle de repreneurs, aide tout au long des négociations et jusqu’à la signature du contrat de cession. Notre objectif est de décharger au maximum les cédants, et bien entendu de réussir l’opération dans les meilleurs délais.
Pour les acheteurs, nous proposons des entreprises digitales en vente, vérifiées et rentables. Un service d’alertes pour les repreneurs d’entreprise est disponible gratuitement : il suffit de s’y inscrire sur notre site. Nous proposons aussi un service d’audit d’acquisition.
Quelques mots sur votre engagement pour la valeur rebond et votre soutien envers LRF ?
Je suis Les Rebondisseurs Français avec intérêt depuis longtemps, et trouve que les valeurs que l’association défend et les problèmes auxquels elle s’attaque sont importants. Nous avons donc décidé de soutenir LRF cette année, tout d’abord en devenant partenaire de l’association avec Storybee.
Nous prévoyons aussi de réaliser plus tard cette année une ou plusieurs interventions avec l’association afin de partager notre expertise et conseils sur la vente d’entreprises, particulièrement dans le domaine du numérique, et de répondre à un maximum d’interrogations que pourraient avoir des entrepreneurs avant, pendant ou après leur rebond.